vendredi 10 novembre 2006

Vendredi 10 novembre 2006: back to Dakar à 8 dans un taxi-brousse...




Vendredi 10 novembre 2006: back to Dakar à 8 dans un taxi-brousse...

Nous avons passé une quasi nuit blanche la nuit dernière. Les sages sont venus chercher Babacar au petit matin pour continuer le cérémoniel. On vient nous réveiller "en urgence" vers 8h du matin, il s'agit de quitter le village au plus vite car la route jusqu'à Dakar est encore longue et la maman de Babacar a préparé à manger pour midi! (Pure utopie... ;-)





Babacar, Moustapha et Ndiogou sont à la maison de la future épouse et nous y attendent. Un petit tour aux toilettes (un trou dans le sol, il s'agit de viser juste ;-) puis Cécile, Nabil et moi nous dirigeons vers la maison.



Dans la cour intérieure de la maison se trouvent rassemblés une trentaine d'hommes du village (le père, la famille, ...) et Adama est assise au centre, couverte de la tête aux pieds par un drap; sa soeur est à ses côté. Elle doit écouter les hommes qui lui serinent ce qu'elle doit faire pour combler et honorer son mari, ses droits et (surtout) ses devoirs en tant qu'épouse. Tout est en wolof naturellement ce qui fait qu'il nous est difficile de comprendre, mais on arrive tant bien que mal à interpréter de quoi il s'agit.







Vu que la cérémonie va encore durer longtemps, je décide de retourner me promener dans Tankon. Je suis toujours une curiosité pour les enfants qui me dévisagent, me demandent une photo, me suivent ou s'enfuient. Chaque contact avec les gens est un trésor et je n'hésite pas à essayer de parler avec eux. C'est souvent difficile à cause de la barrière de la langue, mais je tombe également sur des villageois qui parlent un peu français, notamment avec le forgeron et ses clients à qui j'explique d'où je viens et ce que je fais ici. Je continue mon parcours au hasard, prenant une multitude de photos. Je suis tombé amoureux de ce village magnifique et me prends à rêver de venir m'installer ici, à élever du bétail ou cultiver un champs. On verra, who knows ? :o)























Vers 10h30, il semble que la cérémonie du matin est terminée et Babacar et ses acolytes réapparaissent (après avoir disparus toute la matinée à l'intérieur de la maison). C'est le branle-bas de combat. Dans l'agitation générale, une cinquantaine de femmes chargent leurs bagages et prennent place dans le bus que Babacar a loué pour l'occasion afin d'emmener la famille d'Adama jusqu'à Dakar. On aurait dit qu'elles prenaient des bagages pour 2 semaines, on ne comprenait pas la raison de prendre autant de sacs et de valises. C'est la cohue car il n'y a pas assez de place pour tout le monde, il faut faire un choix sur qui va accompagner Adama jusqu'à la capitale. Je rappelle que seules les femmes viennent. Quant à Babacar et Adama, toujours couverte du drap, ils prennent place dans la Mercedes du Bour du Rip qui va ouvrir le convoi.





Il est déjà 11h30 lorsque nous nous mettons en route. Cécile, Nabil et moi faisons partie des 8 passagers du taxi-brousse: ce n'est pas une Renault Espace, ni une 807, mais notre Peugeot 504 :o) Le voyage s'annonce long, très long: 600 km de routes africaines à 8 dans un break, sans air conditionné... Le thé ne fait plus effet et après cette nuit blanche, ils nous est difficile à tous de garder les yeux ouverts. Je discute un peu avec une cousine d'Adama pour essayer d'en apprendre plus sur la Casamance. Cette superbe région, divisée en quatre Royaume, était encore il y a peu le théâtre d'une guerre entre des rebelles indépendantistes et le gouvernement, qui a duré de 1982 à 2004 (!!). Sur la fin, on a même vu apparaître une rebellion au sein de la première rebellion (notion toute africaine), entre les rebelles partisans de la paix et ceux qui étaient contre. Bien que cette région ait récemment retrouvé un calme relatif, certains rebelles dissidents oeuvrent toujours, mais ils font plus office de bandits de grand chemin que d'indépendantistes à la noble cause. Notre chauffeur nous explique qu'il y a à peine un mois, tout près d'où nous nous trouvions, il est tombé dans une embuscade tendue par ces bandits qui lui ont pris son GSM et son argent avant de dévaliser ses clients. Voilà qui rassure!
Pire, ces rebelles ont versé pendant toutes ces années de guerre des milliers de mines anti-personnelles dans les champs, forêts et chemins autour des villages. Ces mines mutilent chaque année des dizaines de victimes parmi les villageois casacés, femmes, enfants, hommes, dont le seul tort est de se rendre à leur travail ou d'aller cultiver leurs champs.
Malgré ça, la Casamance reste une destination prisée et est considérée par beaucoup comme la plus belle région du Sénégal. Je regrette de ne pas avoir pu la visiter plus en profondeur, mais dès que j'en aurai l'occasion, j'y retournerais certainement.

Entretemps, ces discussion nous mènent déjà à la frontière Gambienne. Nous commençons à être habitués aux manèges des passeports et bakchichs, la route se passe sans encombre. Nous avons beaucoup de chance, nous arrivons à prendre le bac pour traverser le fleuve Gambie sans devoir attendre. Il y a relativement peu de trafic aujourd'hui. Ndiogou nous explique qu'il lui est déjà arrivé d'attendre UNE journée entière avant de pouvoir traverser le fleuve à bord du ferry. Arrivés de l'autre côté, il nous reste encore plusieurs kilomètres avant de déjà rejoindre l'autre frontière. Le garde-frontière gambien me demande si Cécile est ma femme. Mais qu'est-ce qu'ils ont tous depuis le début du voyage ? Partout où nous allons, on n'arrête pas de nous prendre pour mari et femme. Quel beau couple dépareillé 8-) Certains nous souhaitent même un bon voyage de noces... ;-) Mais il faut dire ce qui est, Cécile remporte un succès certain au Sénégal et maintenant également en Gambie.
Quant au douanier sénégalais, il déclare en toute franchise à Cécile qu'il rêve d'épouser une femme française ! Cécile lui répond qu'en Europe, on a droit qu'à une seule épouse. Le douanier nous demande avec un brin d'espoir (et d'humour) si il est possible de "passer à gauche". Cécile lui dit "Ni à gauche, ni à droite, ni tout droit!". Et le douanier de conclure, dépité : "Ha bon? Pas de deuxième bureau alors ?".
Haaaa que la vie est dure en Europe...

Nous faisons une courte escale à Nioro et puis traçons jusque Dakar puisqu'on nous y attend au plus tôt. Manque de chance et coup du sort, la Mercedes qui transportait le couple de jeunes mariés a à nouveau connu une panne mécanique. Nous les dépassons, nous ne pouvons rien faire pour eux, ils ont appelé le mécanicien. A part cela, le reste du voyage se passe pas trop mal pour nous, le sommeil accélérant notre perception du temps, mais pas assez à mon goût. Impossible de dormir correctement dans ce taxi-brousse, à peine est-il possible de somnoler, assis, la tête dodelinant dans tous les sens. Inutile de résumer ce voyage de 600 km qui nous a pris la majeure partie de la journée.




Nous arrivons enfin à Dakar en fin d'après-midi, épuisés. On nous dépose d'abord, Cécile et moi (Nabil étant retourné à son hôtel) chez la cousine d'Adama où nous nous restaurons. Une heure plus tard, nous rejoignons notre maison d'accueil (à Baobab) afin de prendre la meilleure douche de toute la semaine! Ma peau est rouge de poussière, mes narines sont noires, mes cheveux tiennent debout tout seul. J'ai trouvé le meilleur gel naturel: 2 jours à 40°c à suer et prendre la poussière dans la brousse et... les cheveux deviennent secs comme de la paille et tiennent debout tout seul avec un naturel déconcertant. Extraordinaire! J'aime assez bien mon nouveau look de bourlingueur barbu ;-)

Après ce rafraîchissement nécessaire, nous apprenons qu'Adama et Babacar sont enfin arrivés à la maison, avec 3 heures de retard sur nous. Cécile et moi allons donc à Sacré Coeur car bien que la nuit soit déjà tombée, la journée est encore loin d'être finie: il reste encore un cérémonial traditionnel pour conclure le mariage. Lorsque nous arrivons, je suis surpris de voir montée juste devant la maison une tonnelle pouvant facilement accueillir une cinquantaine de personnes. Nous rentrons, beaucoup de monde de la famille de Babacar se trouve là. Je vais ci et là, parlant avec quelques personnes. Dans le garage se trouvent des femmes en train de cuisiner dans d'énormes casseroles (chaudrons ?) : en comptant la famille d'Adama qui arrive, il s'agit quand même de faire à manger pour une centaine de personnes !!! Je discute avec ces femmes qui me disent qu'elles sont les griottes "officielles" de la famille de Babacar, et que ce dernier descend d'une grande famille. Elles me répètent sans cesse qu'elles sont les griottes et que plus tard dans la soirée, il faudra que je leur donne de l'argent. Je le leur promets, afin de pouvoir m'en séparer ;-)




Pour passer un peu le temps, je me mets derrière le PC afin de raconter mes dernières journées exaltantes sur ce blog. Soudain, je me rends compte qu'il n'y a quasi plus personne à l'intérieur. Je m'enquiers de ce monde disparu: seules les femmes de la famille de Babacar sont restées à l'intérieur et se sont réunies dans la cour, barricadées derrière la porte d'entrée. Une forte agitation règne. Je sors par le garage pour voir ce qu'il se passe à l'extérieur. Les hommes quant à eux sont tous dehors, de l'autre côté de la porte, dans la même agitation. A ce moment nous assistons à une négociation entre les hommes laissés dehors et les femmes ne voulant pas les laisser entrer. Comme je l'ai déjà dit, ici la négociation et l'argent sont un jeu, j'en ai encore la preuve devant moi. Les hommes proposent 10000 CFA pour entrer alors que les femmes en exigent 50000 :o) La négociation se poursuit avec âpreté mais dans la bonne humeur et Moustapha le Capitaine, habile négociateur, arrive à faire ouvrir la porte pour 25000 CFA!

J'apprends en fait que Babacar se trouve dans une chambre à l'intérieur et que Adama est bloquée à l'extérieur. Les femmes exigent une somme d'argent pour la faire entrer, en guise de dédommagement du fait qu'une nouvelle rivale va s'installer dans la maison !
Dans la culture wolof, il est également courant d'insulter la nouvelle épouse lors de son arrivée dans la famille. Cette pratique qui peut nous sembler dégradante vise en fait à lui enlever son orgueil en la rabaissant et la préparer à la vie dure à venir. Je précise que ce ne fût pas le cas ici et qu'Adama ne fût pas insultée. Heureusement !

Après la négociation, Adama entre et rejoint son mari dans la chambre. Cette cérémonie se passe à huis clos, seule 2-3 personnes supplémentaires (dont le cousin de Babacar) peuvent se trouver dans la chambre. Un plat avec du lait et du mil se trouve au milieu; une dispute sous forme de course de vitesse s'ensuit (pour du rire !) et c'est celui des deux mariés qui avale la première cuillère de mil qui sera le dominant du couple (celui qui porte la culotte quoi) ! Inutile de préciser que c'est Babs qui a eu la première cuillère ;-) Après cela, les amoureux s'échangent une cuillère de mil.

Au dehors, la soirée se poursuit dans la bonne humeur et les griottes chantent... Le bus transportant la famille d'Adama arrive enfin. Le père de Babacar a prévu un demi-veau de 52 kg pour le repas!



1 commentaire:

Unknown a dit…

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